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J’analyse la rhétorique de JM Jancovici sur le réchauffement climatique

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Si vous connaissez un boomer « moyennement informé sur le réchauffement climatique », il y a de grandes chances qu’il vous dise avoir ADORÉ la BD Le Monde sans fin de Jancovici et Blain.

Jean-Marc Jancovici, c’est celui qui a réussi à la fois à ouvrir les yeux de votre oncle climato-sceptique et qui, dans le même temps, a réussi à faire dire à votre cousine militante à La France Insoumise « qu’on ne pourra pas se passer du nucléaire pour décarboner rapidement nos sociétés. »

Et on pourrait penser que ce succès tient simplement :

  • Au fait que sa posture d’ingénieur lui donne une certaine autorité et le rend ainsi plus crédible.
  • À sa capacité à vulgariser des sujets complexes.
  • Ou encore à ses fameuses punchlines qui permettent de rendre son discours convaincant et mémorable.

Mais si ces 3 ingrédients sont nécessaires pour être un pro de la rhétorique, ils sont loin d’être suffisants pour expliquer L’effet Jancovici sur le réchauffement climatique.

Alors, comment le livre d’un ingénieur qui a consacré sa vie au sujet (pas du tout sexy) des gaz à effet de serre a-t-il pu se retrouver sur la table de chevet de centaines de milliers de personnes ?

Ce que vous apprendrez dans cet article :

  • Comment Jean-Marc Jancovici utilise le procédé de recontextualisation pour discréditer tous ses opposants.
  • Pourquoi il commence toujours par exposer le problème avant de présenter la solution.
  • Comment sa posture empathique-pragmatique lui permet de convaincre les plus sceptiques.

L’économie expliquée par le prisme de l’énergie

Pour comprendre comment Jancovici fait pour s’ériger au-dessus de la mêlée, il nous faut un peu de contexte.

Le mécanisme de recontextualisation

En copywriting, il existe un procédé hyper puissant pour attirer l’attention du public et, dans le même temps, rendre vos concurrents obsolètes.

C’est ce qu’on appelle la recontextualisation.

Cela consiste à dire implicitement : « En fait, ton problème, ce n’est pas A, mais B! » Donc, tous ceux qui cherchent à résoudre A, sont à côté de la plaque.

C’est dire par exemple que « Ce programme sportif ne cherche pas à résoudre votre problème de poids, mais va chercher à améliorer votre santé mentale en vous aidant à lutter contre le stress et l’anxiété ».

Dans le discours politique, on entend que tous nos problèmes viennent de la fin de la croissance, et qu’il faut sérieusement qu’on s’attaque au chômage et à la dette de l’État-providence. Bref, que nos problèmes économiques ont des origines « économiques ».

« La fin de la croissance est un problème énergétique ».

C’est là où Jancovici tire son épingle du jeu.

Il explique que ce qui a déclenché la fin des 30 glorieuses et la crise de 2009, c’est l’épuisement des énergies fossiles, la fameuse « contraction énergétique ».

Le simple fait d’expliquer l’économie par l’énergie, au lieu d’expliquer l’économie par l’économie, attire notre attention car cela propose une nouvelle explication du monde.

Depuis 40 ans, chaque nouveau candidat à l’élection présidentielle dit qu’il sera le président du plein emploi et de la croissance économique, mais force est de constater que l’électorat va de désillusion en désillusion.

Avec une nouvelle explication du monde, vient l’espoir de changement.

Et personnellement, prendre conscience de toute la place de l’énergie dans nos vies et comprendre que nous entrons dans une ère en contraction énergétique m’a amené à me demander : comment faire pour vivre heureux avec moins d’énergie par habitant ?

Et c’est exactement pour cette raison que j’ai créé ce blog.

Comment fait-il pour distribuer autant de claques climatiques ?

Il y a quelques années, j’étais tranquillement installé dans ma vie à 10 tonnes de CO2 par an et puis je suis tombé sur le travail de Jancovici sur le réchauffement climatique. Je sais qu’on est nombreux à avoir vécu ça comme un « avant/après » dans nos vies.

Car à ce moment-là, on a pris une grosse baffe climatique.

On réalise qu’on est tristement « dans la moyenne » en termes d’émission et que réduire notre bilan carbone signifie renoncer à ce que nos grands-parents considéraient comme un luxe (avions / viande / voiture) quand ils avaient notre âge et dont nous ne mesurons même pas la valeur.

Car une fois qu’on connaît les ordres de grandeur, c’est impossible de faire comme si de rien n’était.

Toujours commencer par le problème avant d’exposer la solution

Et pour distribuer toutes ces claques climatiques, Jancovici utilise un triptyque sacré en copywriting : le P.A.S (Problème / Aggravation / Solution).

  • on expose le problème en présentant les faits ;
  • puis on aggrave le problème en mobilisant les émotions grâce à la visualisation ;
  • et enfin, on apporte une solution concrète.

Et en plus d’être une vraie bombe rhétorique, c’est ce qui lui permet d’être dans le bon compromis entre : alerter et rassurer.

C’est exactement cette posture qui est difficile à tenir en repas de famille quand on vous dit : « t’es pas fun parce que tu ne manges pas de viande » ou « avec les écolos on retourne à la bougie ».

Non seulement, émotionnellement de notre côté, il faut qu’on gère notre peur, notre tristesse et notre colère face à l’inaction climatique.

Et en plus, il faut réussir à mettre de côté les attaques ad personam.

Et enfin il faut réussir à respecter la structure Problème-Aggravation-Solution alors qu’on a terriblement envie de commencer par la solution. Mais rappelez-vous : on ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif.

Et surtout, vous pouvez maîtriser la rhétorique et le copywriting à la perfection, mais rien de tout ça ne fonctionne, sans empathie pour votre interlocuteur.

La posture de l’empathique-pragmatique

Vous ne ferez pas bouger quelqu’un si vous ne vous connectez pas à lui émotionnellement.

Et c’est le dernier ingrédient de l’Effet Jancovici sur le réchauffement climatique : face à ses contradicteurs, il fait preuve de compassion.

Cette posture empathique s’oppose à l’approche du culpabilisateur. Il prend le contrepied de l’argument moral de l’écologie, en gros dire “si tu prends l’avion, tu es une mauvaise personne”. En sortant du conflit binaire, c’est bien/c’est mal, il nous permet d’arrêter de voir les gestes écolos comme un truc sacré qui nous rendait moralement supérieurs aux autres.

Plutôt que d’imposer une doctrine, Jancovici fait appel à notre liberté de choisir et mise sur l’intelligence du public. Sa vision de l’écologie est celle d’une science qui nous aide à comprendre les bouleversements du monde.

Mais sa posture empathique ne l’empêche pas d’être un pragmatique, bien au contraire. Les solutions qu’il propose sont chiffrées et reposent sur une planification minutieuse de la transition écologique.

Jancovici sur le réchauffement climatique : atteindre le point de bascule social

Alors vous me direz, “bon ça va, on a compris c’est juste un écolo bon en rhétorique”. Et bien pas seulement. Et justement, j’y viens.

adoption de l'innovation appliqué à jancovici sur le réchauffement climatique

Maintenant, vous comprenez mieux pourquoi Janco arrive à distribuer des baffes écologiques à des personnes pas du tout sensibilisées au réchauffement climatique. En gros, il arrive à convaincre le milieu de la courbe. Et cette capacité à franchir le gouffre en quittant le cercle des “militants convaincus”, c’est bien ce qui pourrait nous permettre de franchir le point de bascule.

En sociologie, un social tipping point (ou point de bascule social) est un seuil à partir duquel une minorité qui adopte de nouveaux comportements peut changer la norme sociale et entraîner dans son sillage la majorité silencieuse.

Dans les années 1950 par exemple, fumer était la norme, c’était même considéré comme quelque chose de glamour. Tout a commencé à changer dans les années 1960, quand une minorité d’experts en santé publique a attiré notre attention sur les dangers de la cigarette. Malgré l’opposition de l’industrie du tabac, cette minorité a fini par atteindre le point de bascule sociale et aujourd’hui, la consommation de tabac est largement perçue comme nocive et est en baisse constante dans de nombreux pays.

Selon l’éditorialiste américain Malcolm Gladwell, ce fameux tipping point se trouve quelque part aux alentours de 10 % d’une population.

Donc si vous aussi au quotidien, il vous arrive de vous demander pourquoi vous continuez de renoncer à l’avion, la viande ou à votre voiture… alors pensez à Janco et dites-vous que vous avez le même but : atteindre le point de bascule social.

Atteindre le point de bascule social

Et si vous voulez nous aider à construire une nouvelle norme sociale autour de l’autonomie et du mode de vie low tech, alors partagez et commentez cet article pour montrer à l’algorithme qui c’est le patron !


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